Biographie d ‘ Henri Cadier par Martine DAVID, sa petite-fille –
Fév.2007 et les témoignages vivants de Paulette CHAPAL, sa nièce ( textes en italiques ) Henri Alfred CA DIER, l’un des «cinq frères» est né à Osse-en-Aspe le 2 juillet 1877 dans le presbytère que ses parents occupaient depuis un an. II était le troisième enfant d’A lfred CADIER e t Helen BOST. De santé fragile, il fut écolier à Osse puis l ycéen à Pau, contrairement à ses frères qui furent pensionnaires à Tournon. Pendant les trois ans de son servic e militaire à Bordeaux, il put commencer des études de droit et f ut licencié en droit en juillet 1903. C’est alors qu’il rencontre Nelly Point qu’il épouse le 11 novembre de la même année à Moncoutant (Deux-Sèvres) où habite la famille Point, propriétaire de plusieurs fermes dans le bocage vendéen. Le couple s’installe à Oloron-sainte-Marie où Henri xerce la profession d’avocat, d’abord comme stagiaire puis comme titulaire. Dès lors Nelly tient les cordons de la bourse, car Henri a une générosité qui lui ferait donner aux par ticuliers comme aux associations caritatives tout l’argent du ménage. En 1905, ils adoptent Madeleine et le 5 décembre 1912 naît leur fils Jacques. C’est dans leur maison qu’ont lieu les premiers cultes de la FRATERNITE, mission évangélique qu’Albert, frère d’Henri, va développer auprès des ouvriers espagnols d’Oloron puis auprès des Espagnols les plus démunis du Haut-Aragon. Militants de gauche, Henri et son jeune frère Charles dé fendent la cause des ouvriers sandaliers d’Oloron en grève et les aident à fonder leur Syndicat (1906- 1909). Le 1er août 1914, Henri est mobilisé et rejoint le 143 e régiment territorial où il est cycliste du Colonel. En avril 1915, il devient tirailleur et passe la fin de la guerre à Verdun, en Champagne puis sur la Somme. Blessé au bras en 191 7, il finit la guerre comme instructeur des futurs tirailleurs. Nelly passe toute la guerre à Moncoutant auprès de sa famille. Libéré en 1919, Henri reprend ses fonctions auprès du Tribunal d’Oloron et aux élections de 1919 il est nommé 1er adjoint de la ville. Ayant fait la guerre dans un régiment avec tous les Aspois, il était très connu dans la vallée d’Aspe et les paysans faisaient souvent appel à lui quand ils se disputaient avec leurs voisins. Mais au lieu de chercher à gagner de l’argent comme avocat, il essayait de les réconcilier, sans qu’ils se fassent un procès pour qu’ils n’engagent pas trop de f rais. C’est ainsi qu’à Osse nous avions très souvent sa visite avant qu ‘il retourne à Oloron. Nous aimions beaucoup notre cher oncle Henri. Lors d’une de ses visites à la fin de l’été, Grannie fui montre une lettre d’oncle Louis Mabille du Lesotho : « La société des Missions a des difficultés budgétaires et ne peut prendre en charge les études en France d’enfants de missionnaires. Je pense beaucoup à mon fils Mohato et prie Dieu, espérant qu’il pourvoira à ses études ». Tranquillement, oncle Henri dit à sa mère : «Je sais qui est Dieu », et il prit Mohato chez lui, payant ses études au lycée d’Oloron jusqu’à son Bachot. Pour moi, petite fille, il était Dieu. En 1926, le Tribunal régional d’Oloron est supprimé et Henri devient avocat auprès du Tribunal de Pau. Grand défenseur des droits de l’homme – il est d’ailleurs Président de la Fédération de la Ligue des Droits de l’Homme des Basses-Pyrénées – il va, entre autres, œuvrer à la révision du procès de Lartigue, injustement accusé du meurtre de deux voisins, et il obtiendra sa grâce aidé par le journaliste Maurice Coriem. Lartigue, seul protestant du village et voisin du couple tué et volé, a été accusé. Oncle Henri a fait appel à un avocat célèbre pour qu’il ne soit pas envoyé au bagne à Cayenne sans preuves. En vain ! Sa mère en est morte de chagrin, sa femme et ses enfants ont dû s’installer ailleurs. Mais le coupable, plus tard, arrêté pour un autre crime a avoué et oncle Henri a pu faire revenir Lartigue du bagne. Quand survient la guerre de 39, ses convictions religieuses, moral es et politiques en font un résistant de la première heure : en tant qu’avocat, il peut aider quelques familles à quitter le camp de Gurs, et il fait partie d’un réseau permettant le passage clandestin de la frontière espagnole. En février 1943, il est dénoncé et doit s’exiler en Suisse pour échapper à la Gestapo. Quand Oncle Henri a appris que la Gestapo devait venir l’arrêter le soir, il a juste bondi à Oloron chez son frère Charles avec tante Nelly. Pour se cacher, ils ont pensé à André et Paulette Chapal dans l’Ardèche montagneuse inconnue d’eux. Après train et bus, ils débarquent à Desaigues et pour ne pas éveiller les soupçons, ils disent qu’au cours d’un voyage, ils s’arrêtent chez une nièce à Labatie d’Andaure. Un taxi veut bien les y amener, Prise de contact avec Jacques Cadier, son fils, pour organiser son passage en Suisse, Pas commode parce-que nous n’avions pas le téléphone chez nous et au magasin de Labatie on téléphonait en public. Henri a dû descendre à pied à Desaigues (6 kms) pour avoir la cabine téléphonique fermée de la Poste. Huit jours après, j’ai dû aller avec oncle Henri à Valence retrouver Jacques dans un bar de Résistants. Celui-ci a regardé ce que son père transportait sur lui. Le malheureux avait deux cartes d’identité, la vraie et la fausse, fabriquée par un officier de l’Armée secrète qui venait tous les soirs écouter la radio de Londres chez nous, et surtout un gros carnet contenant tous les renseignements sur les biens des Juifs, cachés par oncle Henri pendant qu’ils passaient la frontière espagnole à pied! Jacques a caché sur lui la vraie carte et c’est moi qui ai rapporté à Labatie le carnet. Tante Nelly est restée six semaines chez nous. En Suisse, oncle Henri retrouvait ses neveux Guy et Gérard fuyant le service obligatoire en Allemagne. Il y restera jusqu’ en novembre 1944 et y écrit Le Calvaire d ‘Israël , livre de témoignage et de réflexion publié en 1945 chez Labor et Fidès à Genève. De retour à Pau, il reprend ses activités professionnelles, au Tribunal, et politiques comme membre du Conseil Municipal. En 1951, la mort accidentelle de leur belle-fille, mère de cinq enfants en bas âge, amène Henri et Nelly à quitter Pau pour les Hautes -Alpes où leur fils est pasteur, puis ils s’installent définitivement à Moncoutant où ils peuvent accueillir aisément leurs petits-enfants dans la grande maison familiale. Là, Henri va continuer à militer pour la paix, à adhérer à de nombreuses associations humanitaires et aider bénévolement tous ceux qui ont besoin de conseils juridiques. Il entretient aussi une abondante correspondance. L’année 1961 est marquée par le décès de sa fille puis de sa femme. Il n’en reste pas moins actif et voyage beaucoup dans sa famille. C’est au cours d’un de ses voyages qu’il meurt d’un accident cérébral en 1965. Il venait voir ses deux sœurs Mary et Marguerite, très diminuée par sa maladie de Parkinson. Il est mort à Aumessas, chez Mary, au moment où Marguerite mourait à Cornac dans le même département du Gard. Il est enterré à Moncoutant (Deux Sèvres) auprès de sa femme.
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