Portrait : Edouard Cadier

Quelques faits saillants de la vie d’ Edouard Cadier par son fils Francis

 

Novembre 1992

 

Edouard fit ses « humanités », comme les autres, au lycée de Tournon. Plus attiré par le commerce que par les études classiques, on l’envoya à Glasgow, chez Oncle Hugo Roemmele qui tenait un important commerce de charbon et d’acier. Il y passa deux ans. Oncle Hugo le renvoya en précisant qu’il ne ferait jamais une carrière de commerçant ! A son retour, il réussit l’examen d’entrée à l’IDN (Institut Industriel du Nord). Il y fit trois années de 1900 à 1906. Ces dates peuvent étonner, mais le sursis n’étant pas encore inventé, il accomplit ses trois années de service militaire, en sandwich, de 1902 à 1905. Et ceci au 5ème Génie de Versailles – le rail resta pour lui une passion. Il retourna à Lille en septembre 1905 pour accomplir sa dernière année d’études d’ingénieur. En dehors de son travail scolaire, il avait deux activités. Loin de ses montagnes, dans ce plat pays du Nord, il se mit au vélo et spécialement aux courses de vitesse sur piste (vélodrome). Mais il fallait une bicyclette spéciale pour courir sur piste. N’ayant pas l’argent nécessaire à cet achat, c’est son ami Paul Reuss, son compagnon de balades, qui la lui procura. Une année, à l’étonnement du public et plus encore des organisateurs, il fut champion du Nord, battant en deux manches l’enfant du pays, tenant du titre. Sa seconde activité était la fréquentation assidue de la Mission Mac-Ail (Fraternité Evangélique). Il participait à sa vie. C’est là qu’il fit la connaissance d’une jeune veuve, ravissante et fort cultivée qui animait les activités artistiques et culturelles de la Mission. Elle était inoubliable et vibrante sur scène et Edouard vibrait aussi mais … très fort, à ce point qu’il la mit dans ses bagages avec son diplôme d’ingénieur en fin d’année, pour la présenter à ses parents à Osse. Mais Alfred et Helen n’étaient pas seuls à Osse. Albert était là, nouveau pasteur récemment installé. Albert – un port altier, le regard fulgurant et princier du milan royal, la moustache conquérante, accrocheuse, ravageuse même, l’éloquence persuasive, le verbe ensorceleur et charmeur. En réalité, il est certain que la vocation d’Albert correspondait parfaitement à l’idéal de vie de Suzanne. Ce fut certainement une grande déception pour Edouard. Mais rien ne pouvait ébranler ce granit qu’était la Tour (=les cinq frères réunis) dont George disait qu’Edouard en était le ciment. C’est beau la fraternité puisqu’ Edouard fut le parrain d’Henri, premier né d’Albert et de Suzanne! Ainsi commença la vie d’Edouard. Il s’installa à Paris, dans un petit appartement accueillant, toujours ouvert à ses amis, sept clefs étaient

 

  • leur disposition. Il y mena une vie de célibataire rude et sans doute chaste, comme l’eût souhaité Granny-Victoria.

Il était ingénieur-électricien chez Thomson-Houston. Travailleur, il s’y fit une belle situation jusqu’à la guerre 14-18. Entre-temps, son meilleur ami, son condisciple de l’IDN de Lille (il en sortit major) Paul Reuss, épousa sa soeur Marguerite. Ce fut pour lui une grande joie… et il fut le parrain de leur premier né, Georges.

Rencontre avec Laurence Julien

 

Son jour de gloire devait cependant arriver. Son frère George, l’aïnat, était alors pasteur à Pamproux en Poitou, Edouard faisait de fréquents séjours au presbytère. George avait comme paroissienne et amie la famille de Lydie Perrineau, épouse de Louis Julien dont elle eut cinq enfants, dont Laurence. Elle était douce, simple, accueillante, pratique et de bon sens. Elle avait un coeur tout neuf à donner et de plus, un « pedigree parpaillot » sans faille, la croix huguenote vissée sur la poitrine qu’elle avait fort belle. Le coeur d’Edouard fit « tilt » et un écho passionné lui répondit. Ils se marièrent et se rendirent mutuellement heureux jusqu’à ce que la mort les sépare en 1958. Après Georgette et Nelly, une troisième poitevine entrait dans la famille. Edouard et Laurence s’installèrent à Paris et n’étant ni l’un ni l’autre dans leur prime jeunesse, ils commandèrent Eveline immédiatement.

 

La Grande Guerre (14-18)

 

Vint 14-18. Au gré du flux et du reflux des marées du front, Edouard fit sauter et construire, ressauter et reconstruire des ponts de chemins de fer. Comme il avait cette passion des ponts et des chemins de fer, il accomplit régulièrement après la guerre ses périodes d’officier de réserve au 5è Génie à Versailles. En 1936, capitaine de réserve, il est fait chevalier de la Légion d’Honneur. Il reçoit sa croix, un dimanche après-midi d’août, des mains de son frère Henri, devant Granny, ses frères et soeurs à Osse à ce moment là. On sabla le champagne, un événement dans la famille plutôt portée sur le thé! En 14-18 donc, il fut lieutenant, commandant de compagnie et vivait dans un wagon de 1ère classe avec ordonnance et cuisinier… Début 17, le front se stabilisant, il installa Laurence, Eveline et la bonne à Abbeville. Ce séjour en ce lieu m’est particulièrement cher puisque j’y fus conçu et naquis début 1918. Pendant ce temps, son beau-frère, son plus cher ami, Paul Reuss, se faisait tuer dès septembre 14 (il était simple soldat de 2ème classe). Henri, également fantassin, était blessé à Verdun.

 

La paix revenue, Edouard et Laurence retrouvent Paris. Paul naîtra en 1919; Laurence, qui a « petite santé » reste fatiguée. Une jeune alsacienne vient l’aider pour s’occuper de Paul qui démarre difficilement. C’est Maïelle (contraction de Mademoiselle): Berthe Person. Venue pour quelques mois en 1920, elle nous quittera 37 ans plus tard, à l’âge de la retraite en 1956. Intégrée à la famille, elle fut vingt-huit ans l’efficace et discrète secrétaire d’Edouard. Un monument de fidélité et de rigueur.

 

L’industriel

 

En 1923, un grand virage. Edouard quitte Paris et installe sa famille à Orléans. Il collabore à la direction des Ets Rivierre-Casalis, fabricant de matériel de battage. Il est tout de suite pris par le monde de l’agriculture, sa mécanisation. Son avenir n’y étant pas assuré, il quittera Rivierre-Casalis pour reprendre une entreprise similaire, les Ets Raoul Rousseau.

Nous sommes alors en 1927, Edouard a 46 ans et en « épousant » Rousseau, il entre en religion. Il s’entoure de

 

vieux et précieux amis qui le conseillent. Il met dans la société tout son avoir, emprunte et, prévoyant l’avenir, prend une forte assurance-vie dont les lourdes échéances obéreront ses finances jusqu’au plein développement de la société. Il avait une ardeur juvénile, le goût du risque et une puissance de travail volontaire, lente et efficace. Ses horaires de travail étaient invariables: 8h -19 h du lundi au samedi. Un rapide repas à midi (suivi d’une sieste de 10 minutes, sur commande). Tous les soirs après dîner, il était à son bureau et Laurence, installée sur sa chauffeuse cousait.

1927, l’affaire était reprise en pleine crise. Les premières années furent très dures et certaines échéances plus que difficiles. Il me souvient qu’un mois (en 1932?) ayant épuisé tous les recours locaux (banquiers et amis), c’est Jacques Delpech qui, sur télégramme, couvrit l’échéance! Trois dominantes dans sa vie d’industriel :

 

Le chercheur

 

Avec son fidèle collaborateur Beurienne, il prit plusieurs brevets. La première ramasseuse-botteleuse à foin au monde, à bottes légères, est française et non-américaine et sortit des usines Rousseau en 1936. La technique Rousseau a toujours été une technique de pointe. Une réduction au 1/10 de la presse-ramasseuse C 30 (elle tourne encore) est au musée des « Ruralies » à Niort. Les noueurs de cette machine fonctionnent.

 

Le vendeur

 

  • avait une inlassable patience avec ses clients et manquait rarement une vente nécessaire à la stratégie d’implantation de la marque. Edouard instaura des relations chaleureuses entre fournisseurs et clients et diffusa le nom de Rousseau dans toute la France agricole. Les ventes se traitaient dans son bureau ou chez le client, très rarement au bistrot qu’il détestait comme il haïssait les apéritifs (il y prenait, par principe, un éternel vittel-fraise).

 

Le patron

 

En 1927, lorqu’il reprit Rouseau, 30 personnes vivaient sur l’entreprise. Nous étions près de 400 à sa mort. Tous les jours, il passait deux heures dans les ateliers et les bureaux. Il connaissait chacun par son nom, était au courant des diverses situations familiales, souvent le confident ou le « père » écouté. Il avait inconditionnellement confiance en l’homme et ne modifiait son jugement que lorsqu’il était trompé. Le soir, en sortant de chez lui, il visitait fréquemment ceux qui étaient dans la peine ou malades. Les grèves de 1936 ne touchèrent pas l’entreprise. J’avais 18 ans et j’étais à l’usine quand un ouvrier tôlier, Jean Lépine, délégué par ses camarades, frappa au bureau d’Edouard et lui dit : « Monsieur Cadier, les gars des syndicats sont sur le boulevard et nous engueulent; il faut que nous nous arrêtions ». La grève dura une heure symbolique !

En 1934, précédant la loi de deux ans, il institua les congés payés dans l’entreprise. Une semaine en 1934 et deux en 35. Ce qui lui valut de violentes critiques de la part de l’Union Patronale du Loiret. Dès 1930, le personnel participa, selon des critères qu’Edouard avait établis, aux bénéfices de l’entreprise. C’était l’enveloppe de fin d’année, remise solennellement au cours de ce qui devint l’après-midi du « Noël Rousseau ». Une énorme et joyeuse fête familiale: spectacle et jouets, dîner et bal. Edouard ne dansait pas. J’ouvrais le bal avec Laurence qui valsait fort bien. Tout cela n’était pas du paternalisme mais une joyeuse et confiante « convivialité », chacun ayant conscience que, par son travail, il avait entre les mains son propre avenir qui se confondait avec celui de la « maison ».

En 1937, arrivèrent à Orléans les premiers réfugiés républicains espagnols et leurs familles. Ils surent vite que la maison Rousseau était une maison amie. Ils venaient du Centre d’Accueil mis en place par la municipalité. Arrive la guerre et l’occupation. En 1939, l’entreprise employait 80 à 90 personnes. Dès la déclaration de guerre, l’atelier tourna en deux équipes sur des fabrications de guerre (pièces de mitrailleuses et cuisines roulantes). Vint juin 1940 et la débâcle. Edouard a laissé un document dactylographié de quatorze pages relatant l’évacuation de l’usine: archives et Laurence à Pamproux et matériel et machines à Chateauroux, ainsi que le personnel actif et les familles – environ 230 personnes. Une odyssée assez extraordinaire entre le 14 et le 16 juin. Trois jours pour couvrir les 140 kilomètres d’Orléans à Chateauroux, menant à bon port ces 230 personnes et le matériel. Il avait alors près de 60 ans et fit des dizaines de kilomètres à pied ou en vélo, de jour et de nuit, son poing comprimant une hernie. Il retourna à Orléans immédiatement pour faire face aux problèmes de chef d’entreprise, de conseiller municipal, (puis d’adjoint au Maire), de conseiller presbytéral, palliant les absences souvent craintives de ses collègues. On s’installa dans l’occupation. I! fallait survivre. En tout premier lieu, refaire tourner l’usine, donner du travail au personnel. Il s’y employa avec ténacité, habileté, débrouillardise. L’entreprise vivait de la réparation du matériel d’occasion, de petites fabrications diverses et fournissait à l’occupant le minimum de travail imposé et d’une qualité douteuse et à la Résistance des containers en tôle pour les armes parachutées ! 80 à 90 personnes étaient employées (dont, pour un temps, 5 à 10% d’hommes de passage, réfractaires, recherchés ou prisonniers, français ou étrangers qu’il fallait souvent loger). Je fournissais de fausses cartes d’identité et d’alimentation aux plus exposés. Les risques étaient grands pour tous. Pour ces faits, j’ai été arrêté par la Gestapo en février 44 avec une partie du réseau « Vengeance » Orléanais. C’est par miracle que, seul de mon groupe, j’ai échappé à la déportation. Août 44: la libération. Le travail reprend. Paul, prisonnier de guerre évadé, s’installe à Orléans, venant de zone libre où il a terminé ses études d’ingénieur IDN comme Edouard. Je pars, pour quelques années avec ma famille, meunier à Loches.

L’usine de Fleury-les-Aubrais, le grand-oeuvre d’Edouard, est construite. Quatre cents employés, plus de 1.000 ramas-seuses par an, plus de 15.000 m2 couverts (Edouard est fait Officier du Mérite Agricole). Il n’occupera jamais son bureau directorial dans la nouvelle usine. Il meurt en février 58, deux mois avant le déménagement définitif.

 

L’homme chrétien

 

Edouard n’était pas un théologien pour deux sous ! Mais il avait la foi du charbonnier et en tirait les conséquences naturelles : une pratique religieuse régulière, une participation active et généreuse à la vie de la paroisse et à ses oeuvres. Trente ans au Conseil Presbytéral. Mais surtout plus de trente ans Président de l’Accueil Familial, « Oeuvre des Orphelines Prostestantes », créée vers 1840 et dont son grand-père Alphonse, alors pasteur à Blois, avait été administrateur-fondateur. Oeuvre qui ne subsistait que par dons, collectes et le règlement d’hypothétiques pensions. Il la maintint à bout de bras jusqu’à la création de la DDASS. En 1957, il fait acquérir par l’oeuvre la propriété du « Mouteau » en banlieue d’Orléans. Son travail est terminé. Il meurt l’année suivante. En réalité, l’Accueil fut son oeuvre dans l’Eglise, la manisfestation de sa foi, de son besoin de donner de son temps et de son savoir et de son avoir.

Econome de nature, il n’aimait cependant pas l’argent. J’ai su depuis sa mort qu’il donnait largement.

Seule, le « Sphinx » Maïelle, qui tenait sa comptabilité, eut connaissance de cela.

La vie familiale

 

La prière d’action de grâce, avant chaque repas, était dite par l’un de nous, avant de s’asseoir à table. Le culte de famille était quasi quotidien. Edouard le maintint jusqu’à sa mort. Toujours après le dîner, sauf dans les dernières années de sa vie où la Bible et « une parole pour tous » étaient lues au lit. Cela pouvait avoir un bienfaisant effet soporifique sur Laurence, qui parfois, s’endormait paisiblement avant la fin de la prière ! Les activités d’Edouard lui laissaient peu de temps à consacrer à la vie familiale et peu de loisirs. 2 à 3 heures de marche rapide, au bord de la Loire, le dimanche après-midi, il rentrait pour le thé et se mettait au travail en écoutant le concert émis par la radio – il monta lui-même son propre poste de TSF vers 1928. Cependant, par manque de temps, il bricolait rarement et son petit atelier, bien monté, servait un peu de fourre-tout.

Après les moissons, il prenait quelques jours de vacances à Pamproux ou à Osse en septembre. Avant 1930, nous voyagions par chemins de fer. Lors des arrêts, il se penchait à la portière, mettait ses doigts dans sa bouche et sifflait… et le train partait. J’ai mis du temps à m’apercevoir que son sifflet coïncidait avec celui du chef de gare ! Nous, ses enfants, avons fait beaucoup plus de montagne avec « Pouquet » et nos cousins aînés, (les Reuss) qu’avec Edouard. Je n’ai fait avec lui que cinq courses: en 1926, l’Aspe – en 1932, l’Ossau – en 1934, le Néouvielle – en 1937, la Grande Fâche – en 1947, l’Ariel. Il avait 66 ans, un pas assuré et rapide. Juste avant le sommet, il traversa la petite dalle, étroite et pentue, debout, en balançant son piolet (nous l’avons passé à quatre pattes).

Il dépensait peu mais ce qu’il possédait était toujours de belle qualité et venait d’un bon faiseur. Il mettait en pratique ce que disait sa mère : « Je ne suis pas assez riche pour acheter bon marché ».

Les amis

 

L’hospitalité d’Edouard et de Laurence était connue de tous. C’était la maison du Bon-Dieu. Table ouverte, on se poussait pour ajouter les couverts. Ils étaient l’un et l’autre fidèles et constants en amitié.

La famille

 

Elle prenait bien évidemment une grande place dans sa vie. Dès son installation à Paris en 1905, Edouard vit fréquemment ses cousins Bost. Essentiellement les descendants de John: les Charon, Jalaguier et leurs descendants. Gaston et Jacques Bost (fils d’Henri), les Festal-Jalaguier, les Nègre-Charon, les Casalis, fils d’Auntie et d’oncle Fred.

En tout premier lieu sans doute, au fond de son coeur, sont les Reuss. Outre notre maison, le grand jardin de la rue Charles Péguy contenait un pavillon qu’habitèrent tante Guitte et ses trois enfants jusqu’à leur installation à Grenoble. Les Reuss étaient dans notre vie et Edouard essaya de pallier l’absence de son ami Paul.

Mireille vint un an à Orléans où elle obtint au Conservatoire le 1er prix de piano; à l’âge de 4 ans Yano passa plusieurs mois chez nous ainsi que Liliane avant son entrée à Bagatelle.

Edouard fut le représentant légal d’oncle Edmond et tante Val à Madagascar auprès de leurs enfants. Laurence et lui les remplacèrent lors du mariage de Robert et Roger, de même pour ceux d’Henri et Bernard Casalis. And so on… Solidarité familiale…

Edouard mourut aussi simplement qu’il vécut. Se sachant condamné, il suivit avec patience le chemin qui lui était tracé. Aucune révolte, mais un grand sentiment de paix. Trois jours avant sa mort, il réunit dans sa chambre sa famille et ses plus proches amis et demanda la célébration d’un service de Sainte-Cène. J’étais au pied de son lit juste avant qu’il ne rentre dans l’inconscience et il me dit en soulevant ses deux bras : « Je vais vers la lumière ». Il y est en tout assurance.

 

Et Laurence ?

 

Elle vouait à Edouard un amour total, avait une confiance absolue mais non aveugle. Fine et perspicace (Edouard avait grande confiance en son jugement), elle aplanissait sa route, disponible et accueillante, lui ôtant tout souci d’ordre ménager, lui rendant la tâche plus facile. Elle n’était pas son ombre mais vivait dans son sillage. Elle vécut onze années de solitude se prenant étonnament et remarquablement en charge, confiante et sereine, dans la certitude du revoir.

Francis – Edouard – Cadier

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